Quelle est cette méthode ?
La méthode Miyawaki, du nom du botaniste japonais qui l’a développé, est une approche de reforestation qui vise à créer rapidement des écosystèmes denses et diversifiés en imitant les processus naturels.
Elle créée des oasis de verdure au coeur de nos villes et des zones péri-urbaines et recèlent une multitude de bénéfices pour l’environnement et le bien-être humain. La méthode est fondée sur des bases scientifiques solides et repose sur plusieurs principes décrits ci-dessous.
Les principes
La méthode Miyawaki repose sur la plantation de jeunes arbres et arbustes exclusivement indigènes, sélectionnés en fonction de la végétation potentielle naturelle de la région (VPN). Ces arbres sont plantés très rapprochés pour favoriser la compétition naturelle mais aussi la coopération, et accélérer la croissance. En incorporant des plantes de différentes envergures, la canopée devient rapidement dense favorisant le développement d’une biodiversité riche et renforçant l’impact environnemental positif. La méthode consiste également à restaurer un sol vivant pour améliorer la texture, la fertilité et la rétention d’eau.
En imitant les processus naturels de régénération des forêts, cette méthode permet de créer des écosystèmes résilients, capables de se maintenir et de prospérer sans intervention humaine continue. En général, on dit que la micro-forêt est autonome au bout de 3 ans. Cette technique a été appliquée avec succès dans de nombreux pays à travers le monde.
La philosophie sous-jacente est de favoriser un meilleur équilibre qui lie harmonieusement les activités humaines avec la nature. Les forêts Miyawaki sont des forêts à vivre qui s’intègrent à nos espaces de vie et de travail.
Préparation du sol
Préparer et redonner vie au sol, à l’aide d’amendements naturels tels que broyat, compost, fumier, paille pour inoculer des micro-organismes, augmenter la rétention d’humidité et l’aérer. Ce travail préparatoire est un élément clé.
Diversité des arbres
Sélectionner la communauté végétale la plus représentative de la forêt primordiale autrefois présente sur le site de plantation et planter une grande diversité d’espèces pour développer la biodiversité de l’écosystème.
Densité de plantation
Planter avec une densité importante et laisser la végétation se développer spontanément avec un entretien très limité pendant les 2 ou 3 premières années. La densité permet de multiplier l’impact environnemental attendu.
Élément clé : la rapidité
Retour d’une forêt complexe plus rapide qu’en régénération spontanée.
Les bénéfices
- Des habitats pour la biodiversité
Les microforêts sont composées d’un couvert végétal très diversifié qui forme un habitat naturel idéal pour accueillir la faune et la flore natives de la région. - Des alliés pour l’atténuation des changements climatiques
En produisant de l’ombre et en favorisant l’évapotranspiration, les microforêts contribuent à rafraîchir l’air ambiant et crééent des îlots de fraîcheur. - Une amélioration de la qualité de l’air
Les feuilles des arbres captent les particules fines et autres polluants présents dans l’air, assainissant ainsi l’atmosphère et réduisant les impacts sur la santé humaine. - Protection du sol
Le sol est protégé et absorbe beaucoup mieux l’eau de pluie. Les risques d’érosion et d’inondation diminuent considérablement. Le sol est plus frais. - Un renforcement du bien-être humain
Les microforêts offrent des lieux de détente et de promenade, favorisant la réduction du stress et l’amélioration du bien-être général. - Un meilleur cadre de vie
L’esthétique des microforêts embellit les paysages urbains et crée un environnement plus harmonieux pour les habitants. C’est un outil paysager. - Un support à l’éducation et à la sensibilisation
Les microforêts peuvent servir de supports pédagogiques pour sensibiliser les enfants et les adultes, en particulier dans les écoles, où nous plantons fréquemment. Il a été démontré que l’implication par l’action est particulièrement efficace ! - Des atouts économiques
Les microforêts permettent de transformer des terrains sans intérêt en espaces verts productifs et bénéfiques pour l’environnement et les riverains. - Renforcement du lien social
L’implication des citoyens dans la création et l’entretien des microforêts peut favoriser la cohésion sociale et le sentiment d’appartenance à une communauté.
L'évolution d'une microforêt en image
L’évolution d’une microforêt est marquée par une transition d’un paysage initialement clairsemé de jeunes plants vers une communauté végétale mature et équilibrée, autonome, abritant une biodiversité florissante. Voir l’évolution en accélérée d’une microforêt.
Les arbres et arbustes sont disposées de manière irrégulière dans le terrain préalablement préparé, reflétant la manière dont la nature se déploie sans l’intervention humaine, créant des compositions hétérogènes et organiques.
Les plantes poussent vigoureusement pour occuper l’espace disponible, formant rapidement une couverture dense. À mesure que la microforêt se développe, une diversité d’espèces végétales s’installe, créant un écosystème complexe et interconnecté.
Au fil du temps, la microforêt prend son ampleur et atteint un équilibre dynamique où les processus de régénération et de décomposition se déroulent continuellement, assurant la pérennité de l’écosystème à long terme.
L'évolution d'une microforêt en image
L’évolution d’une microforêt est marquée par une transition d’un paysage initialement clairsemé de jeunes plants vers une communauté végétale mature et équilibrée, autonome, abritant une biodiversité florissante. Voir l’évolution en accélérée d’une microforêt.
Plus d'infos sur la méthode
En quoi consiste l'entretien ?
Une microforêt nécessite peu d’entretien pendant les 2 ou 3 premières années. Au-delà, la forêt est autonome.
Pendant ces 2 ou 3 premières années, il est recommandé d’entretenir 2 ou 3 fois par an. Une session au printemps (mai-juin) et une autre fin d’été (septembre). Un entretien intermédiaire en juillet-aout peut s’avérer nécessaire, éventuellement associé à un arrosage ponctuel en cas de sécheresse marquée.
Le principe d’entretien consiste à arracher manuellement les adventices qui étoufferaient les arbres et à les laisser se décomposer sur place.
L’entretien se fait dans une approche de gestion naturelle. Cela implique de maintenir les zones de manière à favoriser la biodiversité et à respecter les écosystèmes locaux, plutôt que de recourir à des pratiques intensives d’entretien telles que la tonte régulière et l’utilisation d’herbicide. Contrairement à une pelouse ou un ensemble arbustif classique, il n’y a quasiment aucun entretien à prévoir une fois que la micro-forêt est autonome.
L’expérience nous montre que l’entretien de 300 m² de microforêt nécessite environ 3 heures pour deux personnes.
Urban Forests fournit une fiche d’entretien très simple et suit chaque microforêt jusqu’à son autonomie
Pourquoi plante-t-on si dense ?
On plante en général 3 arbres au m², toutes espèces confondues, arbres et arbustes. Dans les zones plus méridionales, on plante parfois 4 sujets au m².
La densité favorise la protection réciproque en créant un microclimat propice. Elle permet à la micro-forêt de mieux se préserver du vent, de la chaleur, du froid et des perturbations humaines. Cette proximité stimule la croissance et accélère la régénération du sol. Une partie des sucres créés par la photosynthèse est injectée dans le sol par les arbres pour stimuler la vie microbienne, qui en retour libère la nourriture du sol pour les arbres. La densité de plantation accentue alors les rétroactions positives.
Les arbres et les plantes qui se développent dans ces conditions denses ont tendance à s’adapter en s’élevant rapidement vers la lumière. Il y a alors une compétition intense. Les espèces sélectionnées sont celles qui peuvent coexister de manière harmonieuse et même se soutenir mutuellement.
Chaque espèce va occuper une place qui lui est propre, créant ainsi une végétation étagée, composée de plusieurs strates, similairement à ce qui se produit dans une forêt en libre évolution. Les arbres peuvent être ainsi nombreux en prenant des forment parfois tortueuses formant un espace végétal dynamique et accueillant pour la vie animale.
Comment choisissez-vous les végétaux à planter ?
La composition des végétaux qui sont plantés pour constituer la micro-forêt est établie d’après une analyse de l’écosystème local : climat, sol, exposition, biodiversité existante etc.
On détermine la Végétation Naturelle Potentielle (VNP) d’un lieu en consultant une base de données scientifiques, puis on recoupe avec les observations du terrain. Cela permet de constituer la communauté végétale la mieux adaptée à la zone.
On choisit 20 à 30 espèces natives différentes, arbres et arbustes, dans le but de créer une forêt à étages. La diversité de la forêt offre un milieu extraordinaire pour la biodiversité avec des arbres tortueux qui s’entremêlent et multiplient les habitats possibles pour la vie animale.
En combien de temps une microforêt se crée-t-elle ?
La méthode Miyawaki permet de réduire le temps de création d’une forêt quasi-mature à environ 20 ans, au lieu de 200 ans nécessaires dans le cas d’une régénération naturelle. Cela est rendu possible grâce à la préparation du sol et à la diversité des espèces d’arbres et arbustes plantées simultanément dès le début, favorisant une succession végétale rapide vers une forêt dense et étagée. L’écosystème forestier se reconstitue ainsi plus vite.
La végétation évolue naturellement par étapes selon le principe de succession écologique, chaque strate de végétaux se succédant afin d’arriver à un stade de développement ultime, appelé climax, qui dépend des conditions du milieu. La forêt est dense et diversifiée (en termes d’essences d’arbres et d’arbuste et de tailles des végétaux). C’est ce type de forêt que l’on appelle forêt mature.
Quel est le retour d'expérience de Urban Forests ?
Sur 108 sites plantés par Urban Forests en climats tempérés ou méditerranéens, seuls 3 ont échoué et 2 ont montré des résultats plutôt médiocres. Principalement en raison du manque de protection contre les animaux (lapins, chevreuils), ou en raison de conditions de sol extrêmement sablonneuses sur la côte belge. Toutes les autres micro-forêts donnent des bons résultats, bien que variables.
Après plusieurs années de pratique, notre équipe a cherché à obtenir des données fiables et objectives sur leur évolution. Nous avons ainsi réalisé une étude approfondie sur 6 de nos sites en Belgique, dont les résultats ont été publiés en 2023. Nous avons obtenu des données précises sur la vitesse de croissance, le taux de mortalité, la couverture végétale, l’état du sousbois, le sol, la température et la vitesse d’infiltration de l’eau. Les résultats sont encourageants ! D’après cette étude, les arbres de nos micro-forêts affichent un taux de survie de 76%.
Par ailleurs, nous avons amélioré notre technique au fil du temps, en accordant une attention croissante à la qualité de la préparation du sol, au choix des espèces et à la justesse de l’entretien, améliorant encore les résultats.
Il faut souligner l’importance de rester vigilant à l’égard des projets qui prétendent utiliser la méthode Miyawaki sans en suivre véritablement les principes.
La méthode Miyawaki est-elle adaptée à l'Europe ?
La méthode Miyawaki a été développée au Japon. Au Japon, il existe une multitude de climats très différents, du nord au sud de l’archipel, des régions côtières aux montagnes intérieures, ce qui a permis de tester la méthode dans tous les contextes. Depuis, la méthode a fait ses preuves dans le monde entier.
Les forêts Miyawaki de climat tempéré au Japon poussent plus lentement qu’en zone tropicale, mais l’écart n’est pas immense : en 3 à 6 ans en fonction du stade de croissance, la forêt tempérée rattrape la forêt tropicale. Pour deux climats très différents, les écarts de développement sont donc plutôt réduits. Le Prof. Miyawaki fait état de la prévalence du sol et non du climat dans le développement de la forêt : “Les études de terrain nous ont appris que ce ne sont pas les conditions climatiques mais les conditions de sol qui ont de l’importance.” [traduit de] (Miyawaki, 1999). Par ailleurs, l’observation d’une carte des biomes indique que des types de forêts similaires poussent au Japon et en Europe.
Notre expérience et le recul accumulé sur plusieurs années en Europe démontre l’efficacité de la méthode chez nous aussi. Il est raisonnable de penser que nos micro-forêts évolueront durablement pour devenir des beaux écosystèmes. Nous avons toutes les raisons de penser que les études futures confirmeront les mêmes résultats qu’au Japon, avec des différences régionales, sans que cela ne remette en cause le bien-fondé de la méthode.
De quelles données disposons-nous en Europe ?
Voici quelques sources pertinentes :
L’étude d’Urban Forest de 2023, portant sur 6 micro-forêts, a fourni des mesures précises bien que limitées en nombre de forêts. Ces mesures sont toutefois rigoureuses en termes de collecte et de qualité de données, offrant ainsi une représentation précise de la situation en Belgique.
Les rapports de suivi 2022 et 2023 d’Earthwatch Europe pour le programme Tiny Forest, qui offrent un aperçu de la troisième saison de croissance des micro-forêts plantées au Royaume-Uni, en Irlande et aux Pays-Bas. Avec le suivi de 100 micro-forêts, ce rapport met en lumière les conclusions dans cinq domaines de recherche : la biodiversité, la gestion des inondations, la croissance des arbres et le stockage du carbone, le confort thermique et les avantages sociaux.
SUGi publie annuellement un rapport d’impact qui mesure l’impact humain et fournit des analyses statistiques sur les micro-forêts. SUGi est une plateforme qui travaille en collaboration avec les « Forest Makers » à travers le monde. Début 2024, SUGi a soutenu, co-conçu et planté 184 micro-forêts dans 40 villes de 24 pays à travers le monde.
Le programme Trees Outside Woodland (TOW) est un programme continu d’Évaluation du Capital Écologique National (NCEA) de Grande-Bretagne qui vise à fournir des informations précises sur la taille, la répartition, la composition et l’état des arbres en dehors des forêts et leur interaction avec les écosystèmes situés hors des forêts classiques.
L’Université Wageningen aux Pays-Bas conduit des recherches depuis 2018 sur 11 forêts Miyawaki hollandaises, en partenariat avec des chercheurs du Dutch Institute for Nature Education and Sustainability (IVN). Les résultats sont rendus publics.
Plusieurs universités françaises ont entamé des recherches sur les micro-forêts, à Toulouse, Nantes, Metz par exemple. Les Nations Unies soutiennent le déploiement de la méthode.
Avez-vous quelques chiffres à donner ?
Nous pouvons citer quelques chiffres clés :
Absorption de l’eau : Notre propre étude a montré que l’eau s’infiltre 6x plus vite dans le sol d’une microforêt que dans une pelouse à proximité. Earthwatch UK a montré que le taux d’infiltration est de 24 % plus rapide à l’intérieur d’une micro-forêt par rapport aux zones environnantes pour des microforêts de seulement 1 ou 2 ans.
Compactage du sol : En moyenne, le compactage du sol est de 39 % plus faible à l’intérieur par rapport à la zone environnante.
Température : La température de l’air moyenne à l’intérieur d’une micro-forêt est de 6°C plus fraîche et l’humidité est plus élevée qu’à l’extérieur de la forêt.
Biodiversité : 37 groupes d’espèces sont présents en moyenne dans chaque forêt. C’est beaucoup plus que la moyenne de 15 à 30 espèces utilisées pour créer une seule forêt Miyawaki au départ.
Ces chiffres doivent cependant être interprétés avec prudence et replacés dans leur contexte de mesure, qui n’est pas décrit ici.
Pr. Akira Miyawaki
Botaniste et professeur japonais mondialement reconnu pour avoir apporté sa méthode de création de forêt native. Il développe au départ sa méthode pour restaurer des sols abimés notamment sur des sites industriels et urbains. Ses travaux indiquent que les plantations mimant fidèlement la composition et la structure d’une forêt sans intervention humaine croissent rapidement et se distinguent par leur robustesse écologique.
Entre 1970 et 2021, plus de 2000 projets sont réalisés dans le monde. En 2006, il est récompensé du prix « Blue Planet », l’équivalent d’un Prix Nobel d’écologie.